Dans le cadre du programme REA, nous développons un rover. Nous avons tout d’abord décidé du mode de déplacement du robot, avant de nous pencher sur le type de moteurs à utiliser, puis au choix des roues ou chenilles pour la propulsion. Pour que notre rover soit autonome, il nous faut une source d’énergie, et comme nous avons opté pour des moteurs électriques, il nous faut une alimentation électrique pour l’ensemble. Voyons cette problématique en nous penchant principalement sur les batteries pour rover.

Nous pourrons procéder de deux façons :

  • produire l’énergie sur place et s’en servir tout de suite;
  • stocker de l’énergie produite ailleurs et s’en servir quand on veut.

La première solution implique de pouvoir capter de l’énergie dans l’environnement, en continu, et de la convertir en énergie électrique. Bien souvent, les systèmes capables de générer de l’énergie électrique sont encombrants et lourds. Si l’on souhaite produire l’énergie du robot sur place, il faudra donc optimiser la consommation électrique ainsi que la masse de l’ensemble. Quoi qu’il en soit, la plupart des générateurs électriques fourniront une alimentation variable en fonction des conditions.
Il faudra donc de toutes façons un moyen de stocker l’énergie pour la restituer quand nécessaire. Nous reviendrons ultérieurement sur les systèmes de production d’énergie.

Cela nous amène donc à la seconde solution : stocker une quantité quelconque d’énergie, pour s’en servir quand et où ce sera nécessaire. Pour ceci, deux solutions évidentes :

  • utiliser des piles à usage unique, à changer régulièrement;
  • utiliser des batteries rechargeables.

Les piles à usage unique présentent pour certaines une bonne capacité énergétique, mais à moins de faire un système à consommation extrêmement faible, cela impliquera des changements réguliers de piles. Ce n’est pas très écologique, économique, ni pratique.
On passera donc rapidement sur cette solution pour nous intéresser aux batteries rechargeables. En effet, pour un coût initial un peu plus élevé, on peut disposer d’une bonne capacité de stockage d’énergie, et la capacité de recharger les batteries un nombre important de fois (généralement entre 300 et 1000 fois), directement sur place ou dans un chargeur.

Nous nous intéresserons pour le moment à trois technologies:

  • les batteries au plomb;
  • les piles rechargeables NIMH;
  • les batteries lithium ion ou lithium polymère.

 

Caractéristiques générales des batteries

Avant d’étudier les spécificités de chaque solution, voyons tout d’abord les caractéristiques générales des batteries. Celles ci fournissant du courant électrique, il y aura deux caractéristiques principales à prendre en compte : la tension et l’intensité. Nous verrons également deux caractéristiques importantes : la capacité de la batterie, et son taux d’auto-décharge.

La tension

La tension mesure la différence de potentiel électrique entre les deux bornes de la batterie, et se mesure en volts (symbole V). Dans notre contexte, on cherchera à avoir des batteries fournissant une tension proche de la tension requise par les composants du robot. En effet, pour obtenir une tension parfaite, nous utiliserons des régulateurs de tension, mais ceux ci sont d’autant moins efficaces que la différence entre la tension d’entrée et la tension de sortie sera importante. Ainsi, pour optimiser l’autonomie, il sera souhaitable d’être proches de la tension souhaitée.
Les batteries sont censées fournir une certaine tension, la tension nominale. Ainsi une batterie 2V est censée fournir 2 volts. En pratique, c’est un petit peu plus compliqué : la tension de la batterie variera en fonction de son état de charge. Par exemple, une batterie de 2V complètement chargée fournira 2.1V, et 1.8V lorsqu’elle sera complètement déchargée. Il faudra donc concevoir le système de façon à ce qu’il soit capable de gérer les extrêmes, à savoir la tension minimale et la tension maximale.

D’autre part, ces paramètres varieront dans le temps, selon l’usure de la batterie. Ainsi, la tension maximale deviendra de plus en plus faible, et la tension minimale peut aussi baisser. Au bout d’un certain temps, la tension maximale sera très faible, et la batterie ne stockera pratiquement plus d’énergie. Si en chargeant la batterie celle ci atteint une tension maximale trop faible, il est sans doute temps de la changer.

L’intensité

Le second paramètre primordial d’une batterie est l’intensité qu’elle peut fournir. L’intensité indique la quantité de courant qui peut circuler entre les bornes de la batterie. Plus l’intensité sera forte pour une tension donnée, plus on pourra alimenter des systèmes puissants. L’intensité s’exprime en Ampères (symbole A).
Ici, les choses sont un peu plus complexes que pour la tension, puisque généralement, ce paramètre n’est pas clairement donné.
En effet, pour les batteries on donne plutôt une capacité en mAh ou Ah, soit milliAmpères-heures (ou Ampères-heures). En pratique, c’est plutôt une mesure de la capacité énergétique de la batterie, mais nous reviendrons sur ce point plus tard.
On peut toutefois déduire de cette capacité la quantité de courant maximale disponible.
Pour une batterie de X Ah, on considérera généralement que la batterie peut fournir jusqu’à X ampères. Dans l’absence d’indications contraires, il faut donc éviter d’utiliser plus de courant que cette valeur. Pour certaines batteries, souvent de meilleure qualité, le fabriquant indique un paramètre qui permet de calculer l’intensité maximale exploitable. Pour une batterie de X Ah, on pourra ainsi utiliser jusqu’à C*X ampères à un instant donné.
Par exemple, avec une batterie de 2Ah, et donnée pour 3C, on pourra utiliser jusqu’à 3*2A=6A de courant. Il faut donc veiller à ne pas dépasser cette valeur. Si ce paramètre n’est pas indiqué, on considère que la batterie est de 1C.

 

La quantité d’énergie stockée

L’intensité électrique en ampères permet donc de connaitre la quantité maximale de courant qui peut être utilisée à un moment donné. Mais comment savoir combien de temps durera la batterie? Pour cela, on utilisera les indications du constructeur, avec la capacité en ampères-heures.
Si notre système est alimenté par une batterie de X ampères-heures, et consomme Y ampères, alors il pourra fonctionner pendant X/Y heures. Par exemple, une batterie de 2Ah pourra alimenter un circuit consommant 2A pendant 2/2=1 heure. La même batterie alimentera un circuit consommant 0.2A (200 mA) pendant 2/0.2=10 heures.
Ce paramètre permet donc d’estimer la durée de fonctionnement de notre système. Généralement ce système électrique aura une consommation minimale et une consommation maximale. Si on fait le calcul avec ces deux valeurs, on obtient alors la durée maximale et la durée minimale de fonctionnement.

Cependant, cet indicateur seul ne nous permet pas de calculer la puissance électrique stockée dans la batterie. En effet, il faudra pour cela prendre en compte la tension fournie par la batterie. La puissance électrique d’un système se calcule en Watts (W), et se calcule en multipliant la tension électrique par l’intensité : P=U*I, avec P étant la puissance en watts, U la tension en volts, et I l’intensité en ampères. Ceci est important, car on peut ainsi comparer deux batteries ayant des tensions différentes.

Si l’on a une batterie de 4V, pour 2Ah, elle peut stocker 4*2=8Wh. Cela signifie qu’elle pourra fournir 8W pendant 1 heure. Une batterie de 2Ah, mais en 2V, fournira cette fois 2*2=4Wh. On constate donc que la capacité en ampères-heures ne suffit pas, puisque dans notre exemple, pour une même capacité en ampères-heures, l’une des batterie stocke deux fois plus d’énergie que l’autre.

On pourra donc comparer deux batteries en faisant ce calcul pour voir laquelle donnera la plus grande autonomie au système. Il convient toutefois de bien prendre en compte le fait qu’un convertisseur de tension causera toujours quelques pertes, et qu’on sera ainsi en dessous de la capacité théorique calculée si l’on doit convertir la tension.
Notre batterie de 4V fournissant 2Ah pourrait ainsi en théorie alimenter un circuit consommant 1A en 2V pendant 4h, mais on doit s’attendre à un peu moins du fait de l’efficacité du convertisseur. Un bon convertisseur fournira par exemple une efficacité de 90%, et on obtiendra en théorie 3h36 d’autonomie dans ce cas au lieu de 4h.

 

Le taux d’auto-décharge

La plupart des batteries, rechargeables ou non, se déchargent très lentement même si elles ne sont pas utilisées. Ainsi, même si le système est en hibernation, les batteries se videront très lentement. Ce taux se mesure en pourcentage de la capacité totale perdue par mois. Pour un système ayant une autonomie de quelques heures, cela n’aura donc probablement pas d’importance. En revanche, pour un système devant fonctionner des mois, il faudra prendre en compte ce paramètre. Ainsi, un robot peut se mettre en veille pour ne presque rien consommer, mais son autonomie ne sera pas pour autant infinie.
Le taux d’auto-décharge varie en fonction des types de batteries, et également des modèles pour un même type. Mais d’un point de vue général, voici une indication de ce taux par type de batterie :

  • NiCD : 15-20% par mois
  • NiMH : 25-30% par mois
  • Lithium-Ion : 2-5% par mois
  • plomb : 4-6% par mois

 

Les différents types de batteries pour rover

Passons maintenant aux spécificités de chaque type de batterie afin de pouvoir sélectionner les plus adaptées au programme.

Les batteries au plomb

batterie au plomb de voiture : puissante et économique, mais lourde. Choix peu pratique de batteries pour rover.

batterie au plomb de voiture : puissante et économique, mais lourde.

Les batteries au plomb sont basées sur une technologie très ancienne (1859). Pour une capacité énergétique donnée, ce sont les plus lourdes, ce qui est logique vu que c’est la plus ancienne technologie de batteries rechargeables utilisée à l’heure actuelle. Ces batteries permettent de fournir 20 à 40Wh par kilogramme de batterie, ou 40 à 100Wh par litre. Elles ont une bonne durée de vie, et sont particulièrement résistantes. Elles sont en outre capables
de fournir un courant important, et acceptent plus facilement de mauvais traitements que d’autres technologies. Ce sont généralement les modèles les moins chers.

Une bonne technologie si le poids ne compte pas, si le coût est important ou si la batterie risque de subir des traitements rudes. En pratique, pour de petits robots, ce n’est pas une solution très adaptée, car on trouve difficilement des batteries au plomb en dessous d’une certaine taille, et leur faible densité énergétique jouera sur l’autonomie. En effet, pour une masse donnée, on aura moins d’énergie, et pour une quantité d’énergie donnée, une masse supérieure, donc un robot se déplaçant plus difficilement, consommant ainsi plus de courant. En revanche, pour un robot de taille moyenne (quelques kilogrammes ou dizaines de kilogrammes), c’est une solution intéressante car très économique : une batterie de scooter ou de voiture pourra alimenter le système pour un coût mesuré.

 

Les batteries NiMH ou NiCD

Batteries NiMH de marque eneloop, réputées pour leur faible taux d'auto-décharge. Choix acceptable de batteries pour rover.

Batteries NiMH de marque eneloop, réputées pour leur faible taux d’auto-décharge

Une autre technologie est celle des batteries au Nickel. On en trouve principalement deux sortes : les Nickel-Cadmium (NiCD), de plus en plus rares, et les Nickel-metal hydride (NiMH), qui représentent la grande majorité des piles rechargeables AAA et AA du marché. La technologie NiMH remplace la technologie NiCD moins efficace, et hors raison spécifique, on a plutôt intérêt à prendre du NiMH. D’autres technologies existent, et fournissent de meilleures performances, mais elles sont encore rares et chères.

Les NiMH offrent une densité énergétique de 30 à 80Wh par kilogramme, ou 140 à 300Wh par litre, sont relativement résistantes, mais ont un fort taux d’auto-décharge. Le format le plus courant est celui des batteries AA ou AAA, qui fournissent une tension nominale de 1.2V, et 1.0V ou moins quand elles sont déchargées. On peut les décharger complètement, mais il ne faut pas les sur-charger. Elles sont en outre économiques, et avec le format AA ou AAA, on peut facilement les mettre en série pour obtenir une tension cible, ou en parallèle pour multiplier l’intensité maximale.

 

Les batteries au lithium

Batterie lithium-ion 3.6V (ancienne norme) de téléphone. Un bon choix de batteries pour rover.

Batterie lithium-ion 3.6V (ancienne norme) de téléphone

Les batteries lithium-ion (Li-Ion), parfois appelées lithium polymère (LiPo) sont des batteries efficaces mais sensibles. Elles permettent de fournir 100 à 270Wh par kilogramme, ou 250 à 700Wh par litre. Chaque batterie fournit 3.7V (entre 3.3V et 4.2V en pratique). Ces batteries sont efficaces, mais un peu plus chères (bien que si l’on calcule le prix par rapport à la capacité, elles soient plus rentables), et doivent être utilisées avec précaution. En effet, il faut charger les batteries en respectant les spécifications du constructeur, car il y a des risques d’incendie ou d’explosion dans le cas contraire.
On associe donc généralement ces batteries à un circuit de charge spécifique aux batteries liIon/LiPo. Elles ont un très faible taux d’auto-décharge, et peuvent fournir des courants importants. En revanche, il est généralement déconseillé de faire des assemblages soi même (parallèle ou série), car les batteries doivent être identiques, et testées pour cela. Si l’on souhaite des batteries en série ou en parallèle, les fabricants vendent de tels modules déjà assemblés, et garantis. La flexibilité est donc plus faible qu’avec des batteries NiMh, et il faudra prendre davantage de précautions. Cependant, cette solution est celle qui fournira la plus grande autonomie. Dans le domaine du modélisme, on pourra trouver une grande variété de modèles, à des prix corrects. Il faudra toutefois compter l’achat d’un chargeur spécifique (qu’on ne trouvera que dans des magasins spécialisés). On pourra à la place utiliser un circuit de charge spécifique à intégrer au rover pour ne pas avoir de chargeur externe.

 

Conclusions sur les batteries

Parmi ces trois technologies, quelles batteries pour rover choisir? Pour de petits robots, on peut déjà écarter les batteries au plomb. Ce choix reste toutefois à considérer pour de gros robots, si le coût est important.

A plus petite échelle, la solution la plus simple à mettre en oeuvre sera probablement celle des batteries NiMH. Les chargeurs sont économiques et faciles à trouver (même s’il est intéressant d’investir dans un bon chargeur, qui augmentera la durée de vie des batteries, fournira une charge fiable et/ou plus rapide et une durée de charge automatiquement calculée et adaptée), le coût est très modéré, et l’ensemble très modulaire. A moins de contraintes de masse et de volume serrées, les AA offrent une meilleure densité que les AAA, et sont donc préférables. Il faudra acheter un fabriquer un boitier accueillant les batteries en série ou parallèle (ou toute combinaison souhaitée), et on pourra ainsi adapter la tension et l’intensité en sortie.

Les batteries au Lithium sont la solution la plus performante, on aura généralement 5 fois plus d’énergie stockée dans la même masse, et donc une autonomie significativement plus importante. En revanche, il faut des composants spécifiques pour la charge, ce qui alourdit légèrement la facture. C’est toutefois un investissement qui vaut le coup, et l’ensemble reste accessible, voir assez même plus économique si l’on considère la capacité en fonction du prix. D’autre part, même en y mettant le prix, il n’est pas possible d’atteindre de telles performances avec les NiMH.
Enfin, si l’on veut atteindre des tensions élevées, et/ou des intensités importantes, les batteries au lithium seront souvent la meilleure solution, car il faudrait parfois de très nombreuses batteries NiMH en série ou parallèle pour atteindre des performances équivalentes, ce qui augmenterait d’autant le risque de
défaillance d’une batterie, et rendrait plus compliquée la charge. Notons de plus qu’avec les batteries lithium on peut relativement facilement intégrer un chargeur au robot, voire un chargeur solaire, chose plus complexe avec les NIMH pour lesquelles on trouve difficilement ce genre de circuits. De fait il faudra enlever les batteries pour les recharger, et donc arrêter le robot. Il ne pourra de fait pas se charger tout seul non plus.

En conclusion, la meilleure solution sera celle des batteries LiIon/LiPo, à moins de vouloir diminuer les coûts. Dans ce cas, les NiMH offrent une alternative correcte et très économique. Dans certains cas, avec des systèmes consommant peu, le lithium pourrait apporter plus de performances que ce qui est nécéssaire, de sorte que le NiMh serait plus rentable/rationnel.
Pour la suite, nous conserverons donc ces deux solutions, et présenterons au moins un montage basé sur le NiMH et un sur le LiIon/LiPo.

 

Dans le prochain billet, nous nous pencherons sur les circuits de contrôle des moteurs qui nous permettront de gérer la rotation de ceux ci (vitesse et direction) et ainsi le déplacement de notre rover.

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